Mortalités chez les oiseaux coloniaux marins associées au virus de l’influenza aviaire H5N1 hautement pathogène au Québec
La semaine dernière plusieurs mortalités de fous de Bassan nous ont été rapportées aux Îles-de-la-Madeleine, Québec. Des estimés conservateurs font état de plus d’une centaine de morts d’individus de cette espèce, et ce en quelques jours seulement. Des mortalités inhabituelles d’eiders à duvet et de goélands marins ont aussi été documentées dans l’estuaire du Saint-Laurent, Québec, cette semaine.
Des carcasses de fous de Bassan, d’eiders et de goélands marins ont été soumises au CQSAS (RSCF-Québec) pour analyse. Les oiseaux soumis étaient habituellement en très bon état corporel, indicatif d’une mort suite à une maladie de courte durée. Plusieurs des oiseaux présentaient de l’hépatomégalie (augmentation de la taille du foie) ainsi que des zones de décolorations au niveau du foie et du pancréas. Des lésions typiques d’une infection par l’influenza aviaire hautement pathogène, incluant de la nécrose au niveau de plusieurs organes, ont été observées à l’examen microscopique. De plus, les tests moléculaires réalisés par le laboratoire provincial du MAPAQ se sont avérés “présumé-positifs” chez l’ensemble des oiseaux testés. Bien que ces résultats devraient être officialisés par l’Agence canadienne d’inspection des aliments, ils indiquent que les mortalités observées chez les fous aux Îles-de-la-Madeleine et les eiders et goélands dans l’Estuaire du Saint-Laurent sont sans aucun doute causées par une épidémie d’influenza aviaire.
Cette observation indique que ce virus, qui a été observé en premiers lieux chez les oiseaux migrateurs, est maintenant bien établi dans les sites de nidification d’oiseaux marins coloniaux. L’importance des mortalités documentées jusqu’ici suggère que ces espèces présentent une susceptibilité élevée à ce virus. L’agrégation dans les colonies des oiseaux au cours de la saison de nidification favorise sans aucun doute la transmission du virus.
Bien que l’impact qu’aura ce virus émergeant sur les populations de fous de Bassan et d’eiders à duvet reste incertain, cette nouvelle cause de mortalité j’ajoute aux problèmes observés au cours des dernières années dans plusieurs populations d’oiseaux coloniaux marins. En effet, les populations de fous de Bassan présentes au Québec ont connu une diminution importante de leur productivité vraisemblablement consécutive à la modification de la distribution du maquereau bleu vraisemblablement associée aux changements climatiques. Bien que les populations d’eiders à duvet du Québec semblent stables ou même en croissance, des diminutions d’abondance ont été documentées dans plusieurs colonies du Maine et de la Nouvelle-Écosse suggérant un déclin potentiel de l’espèce. Le suivi des mortalités associées à ce virus dans ces populations d’oiseaux nous permettra de mieux comprendre l’effet potentiel de ce virus sur la dynamique de ces populations.
Stéphane Lair
CWHC-Québec
Photo : Colonie de fous de Bassan